L’interdiction des tests ADN à visée généalogique en France revient sur le devant de la scène. Dans une tribune publiée ce mois-ci dans “La Croix”, une centaine de signataires généalogistes, juristes, parlementaires, professionnels de santé et représentants associatifs appellent à lever un cadre juridique qu’ils jugent désormais inadapté. Tous dénoncent une situation qu’ils estiment en décalage avec les pratiques européennes et les usages réels des particuliers.
Aujourd’hui, en France, ces tests restent strictement réservés aux contextes médical ou judiciaire. Leur achat et leur utilisation à titre privé demeurent passibles de sanctions pénales. Une position qui fait de l’Hexagone l’un des rares pays à maintenir une interdiction aussi ferme, alors que ces kits sont librement accessibles dans une grande partie de l’Europe.
CONNAÎTRE SES ORIGINES : UN DROIT OU UN RISQUE ?
Pour les auteurs de la tribune, l’argument de la protection ne tient plus. Selon eux, l’interdit français n’empêche pas les tests, mais les déplace. De nombreux utilisateurs se tournent vers des plateformes étrangères, hors de tout contrôle national, exposant leurs données génétiques à des usages mal définis, parfois opaques. L’interdiction produirait ainsi l’effet inverse de celui recherché.
La question des origines personnelles occupe une place centrale dans le débat. Les tests ADN sont perçus par leurs défenseurs comme des outils permettant de lever des silences anciens : filiations inconnues, adoptions, naissances sous X, dons de gamètes. Pour certains, il s’agit moins de curiosité que d’un besoin intime, parfois formulé après des décennies d’interrogations.
Les partisans d’une évolution législative rappellent que plusieurs pays européens, Royaume-Uni, Allemagne, Espagne, autorisent ces pratiques depuis longtemps. Sans dérives massives ni désordres familiaux documentés. En France, des députés et des spécialistes de la bioéthique avaient déjà pointé, ces dernières années, l’incohérence d’un interdit maintenu alors que des millions de tests sont réalisés ailleurs sans conséquences majeures identifiées.
PROTECTION DES DONNÉES ET ENCADREMENT ÉTHIQUE
La question des données génétiques demeure toutefois au cœur des réticences. En l’absence de cadre spécifique, les profils ADN de citoyens français sont stockés dans des bases de données étrangères, échappant aux autorités nationales. C’est précisément sur ce point que les signataires plaident pour un changement de paradigme : légaliser, mais encadrer strictement.
Ils évoquent la mise en place de normes de sécurité renforcées, des limitations d’usage claires, des contrôles publics et une transparence accrue sur le devenir des données biologiques. Un dispositif qui permettrait, selon eux, de concilier respect de la vie privée, exigences du droit civil et avancées scientifiques.
Au-delà de la question technique, c’est un débat de société que cette tribune entend relancer. Celui d’une législation bioéthique capable d’évoluer avec son temps, sans ignorer les attentes individuelles ni les réalités numériques. Les auteurs espèrent que la prochaine révision des lois de bioéthique intégrera pleinement cette question, longtemps laissée en suspens.
La France pourrait ainsi sortir d’une exception de plus en plus perçue comme anachronique, tout en affirmant un cadre protecteur là où d’autres pays ont laissé le marché s’autoréguler. Reste à savoir si le débat, désormais relancé publiquement, trouvera un écho politique à la hauteur des enjeux soulevés. Pour être au courant des dernières infos, inscrivez-vous gratuitement à notre newsletter.
François Deymier (rédaction btlv source la croix – photo home page @btlv via adobe stock)








